SOMMES-NOUS ENCORE REELS ? (Ontologie négative 8)

Le train s’alanguit dans sa vitesse. Les bruits sont légers, tapis,  faciles à omettre. La négligence usuelle qui nous sert d’existence s’établit sans peine. Rien n’est aisé comme glisser sur son plan de  réalité. Il suffit que rien ne nous arrête. Insidieusement, la vie devient un glissement, où toute mission est omission. Chaque plan,  comme une facette, est une surface ou un pli du monde en vigueur. Une couche d’aquarelle. Rien ne peut plus nous arriver sur un plan, hormis un dérangement, et c’est ainsi, de plus en plus souvent, que se rencontrent l’être ou l’autre: par quelque arrêt intempestif, par  quelque trouble énigmatique, ou quelque écueil qui ne se résorbe pas  assez immédiatement dans le flux continu de notre négligence. Flot,  flux, flou: tout doit se fondre sans éveil. Internet même est  glissement, sommeil. On ne sait plus, dans le flot, si c’est le monde  ou moi qui passe, et qu’importe, au fond, si tout se fond dans un plan  d’irréalité?

26 thoughts on “SOMMES-NOUS ENCORE REELS ? (Ontologie négative 8)

  1. Vie plan-plan. Ou vie accident(s). Le pire c’est qu’on ne se rend pas toujours compte de son ennui. On est “dedans”. Alors qu’il faudrait sortir du plan – qu’on ne voit plus.

    Bravo pour vos ontologies.

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  2. il n’y a que de réelles attentions qui peuvent parfois nous matérialiser… 😉 merci pour le lien… Entre évanescence de l’âme et mouvements fuyants nous faisons tous pour éviter l’autre ou même s’éviter soi-même…il y a des logiques qui nous échappent alors que l’une de nos obsessions ou prétentions est bien de vouloir laisser sur cette terre un petit bout de nous….. un je ne sais quoi de réel ?!

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  3. Je me demande si la réalité ne peut se départir de l”écueil qui ne se résorbe pas immédiatement”. Par leur caractère contraignants et leur temporalité, les écueils sont des zones de “turbulences” que nous traversons, et au sortir, nous gagnons notre diplôme.

    Après plusieurs étapes et expériences similaires, nous présentons notre CV (le terme latin est assez évocateur) garni des moments “d’éveil”, c’est-à-dire des traversées que jalousement nous mémorisons…..
    Alors, doit-on continuer à mesurer la “vie” en unités temporelles égales et promulguer froidement le seuil de la vieillesse?
    La “qualité” des “moments d’éveil” est, au moins pour chacun, un “patrimoine” réel ….s’ajoutant au patrimoine génétique .

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    1. Mais un espoir de quoi ?
      Butiner d’un plan à l’autre, croiser différentes réalités, s’ignorer, se sourire, se parler, se toucher, se quitter, revenir, regarder, échanger… Une belle manière d’explorer la vie et d’agrandir son intérieur, culturel et emotionnel.
      Merci de m’y avoir fait une petite place dans le tien…

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      1. Vous décrivez fort bien l’espace qui sépare la rencontre du simple croisement, tout d’ignorance mutuelle. Mais ne peut-on, au delà des personnes, rencontrer tous les êtres, et n’importe quel détail de chaque être? aller et s’allier au réel?

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  4. Quand j’étais petite, le monde autour de moi me paraissait inacceptable et depuis, j’ai fait mienne cette triviale devise de l’ambassadeur des ombres, héros des Bd de ma jeunesse, “quelle réalité , papa ?”. Réalités, espaces glissants et éphémères où nulle vérité n’habite, et pourquoi cela devrait-il être effrayant ?Toute notre vie est une forme de fabulation incroyable, mais si on y ajoute le plaisir et l’audace, cela reste un univers à savourer….

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