Vous arrive-t-il de compter sans raison?(Sur Placement libre d’Ella Balaert)

« Des marronniers bordent le chemin, 1,2,3,4,5, marronnier, 1,2,3,4,5, marronnier.

Ton esprit compte ça l’occupe ça t’occupe, mais quand tu t’en aperçois ça te gêne,

il y a dans toute occupation quelque chose de brutal, de possessivement brutal qui te gêne,

il y a quelque chose de militaire dans cette occupation il y a du violent, et quand tu t’en aperçois tu détournes tes yeux des marronniers tu résistes, ça ne résout rien mais c’est un répit. »

 Ella Balaert : Placement libre    (Editions Des femmes)

Pourquoi comptons-nous ?

Pourquoi faire défiler les nombres dans nos têtes ?

Est-ce la raison pure ou la déraison pure ?

Est-ce pour vérifier notre avoir, ou mesurer nos manques ?

Est-ce pour avoir un futur strictement prévisible ?

Est-ce pour ficher ça et là un peu d’ordre dans l’inconnu ?

Ou bien est-ce pour compter soi-même,

pour figurer dans l’existence ?

12 thoughts on “Vous arrive-t-il de compter sans raison?(Sur Placement libre d’Ella Balaert)

      1. Pour ceux qui les comprennent (dont je ne suis pas, mais un de mes fils, matheux, me l’a fait entrevoir), les chiffres constituent le langage d’un monde qui ne cesse de se construire, ne connaît pas de limites et a sa poétique propre, voire sa musicalité ; ils seraient langage au même titre qu’un autre, avec cette même capacité démiurgique ou magique de révéler un univers jamais fini. C’est aussi une dimension de vertige, les chiffres et c’est happant (enfin, pour moi 🙂 ) Alors, on compte sans savoir ce que cela veut dire réellement mais comme on chuchote parfois des vers dans une langue étrangère parce que c’est beau ..

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  1. Je pense que ces énumérations répondent une rythmique particulière. Elle crée du plein dans un moment de vacuité. Le vide, comme un certain type de silence, peut être très anxiogène. Alors on compte, et l’espace de cerveau disponible est à nouveau nourri par une routine numérique qui occupe l’espace.

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