Le plaisir chronophage

La plaisance est un groupe immense, rassemblé autour d’un principe : ne faire que ce qui lui plait. Ce principe est d’abord un mode de plaisir, car il voue le désir à l’image, en le détournant du réel, de la chair, du grain concret des choses pour le conduire au travail payant de l’imagination. Ensuite un mode de domination qui répudie les disciplines foucaldiennes, tout en périmant le contrôle que nous décrit Deleuze. Je veux ne travailler que pour qui me plait, et de fait, je travaille incomparablement mieux pour lui, puisque le simple fait qu’il me plait constitue déjà un temps de travail de l’imagination que j’ai effectué pour son compte. Ce principe constitue donc le mode d’assentiment par lequel on peut définir une nouvelle couche sociale, qui est de loin la plus nombreuse dans les pays développés, et constitue le coeur de la société chronophage, puisqu’en plus du travail classique, elle fournit l’essentiel de le travail de l’imagination. Je propose de la nommer “plaisance“, en référence à l’objet de son désir, et à la désespérante douceur de son aliénation.

Ce texte est un extrait des Chronophages, à paraître les 15 Janvier

8 thoughts on “Le plaisir chronophage

  1. La plaisance est un joli mot. Le plaisir est furtif, la plaisance est moins éphémère. Le vivre tout simplement est certainement préférable au plaisir tout comme à la plaisance.

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  2. “Je veux ne travailler que pour qui me plait…”
    J’ai trouvé : pour moi ! car dans la plaisance je me plais 🙂

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  3. Il y a une petite histoire d’un ‘homme d’affaire’ qui rencontre un pêcheur assis devant sa maison-cabane. Le pêcheur a terminé sa pêche et fait la sieste. Le riche lui demande combien de temps il travaille par jour. Le pêcher lui répond : de quoi nourrir ma famille … 30 minutes ? 1h00. L’homme d’affaire lui explique qu’en pêchant plus, il pourrait gagner plus, avoir plusieurs bateau, et faire travailler d’autres personnes, et ainsi de suite. Le pêcheur lui demande, dans quel but ? Comme cela tu pourras, dans quelques années, les autres travailleront pour toi et tu pourras faire la sieste …

    Dans ma région de montagne, le travail historiquement, pour plusieurs est ‘un dieu’. Travailler beaucoup, même pour des tâches ingrates, fait ‘la grandeur de la personne’. L’immigration RÉCENTE est pour plusieurs aussi, l’astuce trouvée’ pour ‘faire ce qui plait’ et ne pas faire de tâches répétitives ………….

    Je ne généraliserais donc pas le texte d’entrée en parlant ‘des pays développés’ ou encore de l’immigration … dans les pays ‘développés’, je doute que la majorité des ‘travailleurs’ ne font que ce qui leur plait … même en ayant un métier ‘passionnant’, il y a souvent des contraintes ‘inattendues’ … une petite poignée de personne font ‘uniquement ce qui leur plait’ et encore … et paradoxalement, ne faire que ce qui plait fait de moins en moins plaisir … ou encore, suscite l’envie de choses ‘difficilement atteignables’ voir pas du tout … et si dans le cadre du travail, ‘tout’ est atteignable, nous allons souvent rechercher ‘inatteignable’, c’est à dire les difficultés dans ‘notre vie privée’ …..
    Non ?

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