<Para leer el texto en espanol, ver encima “espanol” y entonces “la éra de los cronofagos”>
Pierre, quinze ans, travaille dans sa chambre : il termine son devoir de mathématiques pour lundi. Son ordinateur diffuse un morceau de son groupe préféré, qu’il a téléchargé la veille. Dans une autre fenêtre, sur le même écran, un réseau social lui permet de recevoir les messages de ceux de ses copains qui sont connectés en ce moment. A côté de la souris, son téléphone portable reste ouvert, au cas où sa copine l’appellerait. Le travail classique, ici intellectuel, s’opère bel et bien, en un point concret de l’espace physique. Mais il n’est plus qu’un des fils de l’écheveau des liens en cours. Et chacun de ces liens, proprement vitaux, est établi par un appareil ou un logiciel qui capte une part de notre temps, un chronophage. Pierre ne fait plus rien sans disposer autour de lui l’ensemble de ces capteurs, qui sont à la fois des émetteurs récepteurs de flux discursifs et des capteurs inflexibles de son propre temps, à la manière d’exploiteurs ou de percepteurs. Ce qui est neuf, c’est que cette relation de communication chronophage est la première forme d’exploitation vécue comme une libération, et revendiquée comme une existence véritable. Nous voulons bien travailler, mais à la condition expresse de rester connecté, comme si la captation de notre temps était devenue notre condition d’existence.
Nous voici dans l’ère des chronophages. Que faut-il entendre par là ? La chronophagie est le système qui suppose une immense fracture ente la vie et l’existence, puis propose de la surmonter cette par un nouveau lien, indissolublement imaginaire et tarifaire. Cette utopie nouvelle, immédiatement accessible, nous propose de cesser de perdre le temps que nous passons à vivre : il suffit de cliquer, d’imaginer et de payer pour passer directement de la routine à la péripétie, de la vie à l’existence.
Le postulat de base de la chronophagie, que nous acceptons comme une évidence première, est que la captation est la seule source de l’existence. Ce principe est susceptible de deux formulations : positivement, « être connecté, c’est exister » ; négativement, « il n’y a pas d’existence en dehors de la chronophagie ». Aussi sûrement que l’Etat de Max Weber s’assurait un monopole de la violence physique légitime, la chronophagie s’arroge un monopole de l’existence véritable.”
Ceci est un extrait de Jean-Paul Galibert, “Hypertravail et Chronophagie, l’envoûtement hypercapitaliste comme temps de travail imaginaire du consommateur”, article qui vient de paraître dans le numéro 51 de la revue Multitudes.
Como, cuando y de que forma gestionas tu tiempo define tu existencia.
LikeLike
pero quien manda?
LikeLike
L’homme a toujours cherché à suivre le temps, d’abord par les saisons, puis il devint plus précis, le calendrier de Maya par exemple. L’agriculture a donné une certaine notion du temps, mais ce n’était pas si précis. Au fil du temps on a réussi à inventer des horloges, montres et aujourd’hui les ordinateurs et téléphones. On vit une vie encadrée…
LikeLike
captée?
LikeLike
Captée ? Peut-être le mot juste… Je n’en sais rien, juste une réflexion sur le temps… On se crée une vie liée à l’horloge, aller au travail le matin, pause-déjeuner à midi, rentrer chez soi le soir…
LikeLike
Oui, je prends de mon temps pour vous lire sur le web 😉
LikeLike
Moi plus encore à l’écrire
et qu’importe au fond?
le sens le plus critique
n’empêche pas l’ensemble
d’être du temps de connexion…
LikeLike
L’Homme est ainsi fait, cherchant toujours mieux !
D’ailleurs qu’avez-vous fait vous-même en publiant sur votre blog et moi en y venant et en gérant le mien 🙂
De tout temps, l’Homme s’est mis des obligations, plus marqué avec l’ère de l’informatique et des portables, une communication plus poussé, mais paradoxalement brève, sélectionnant son temps et ses réponses n’étant pas moins contraignante pour autant, bien au contraire. Pourtant la vraie et la belle communication n’est pas là, elle est dans notre vie de chaque instant. L’Homme se sent certainement dans une extrême solitude pour en venir à cela, le résultat d’une société individualiste, non ? !
L’ère moderne de la communication est positive lorsque l’on trouve son juste milieu, hé oui encore et toujours ! 😉 Lorsque l’on a ce juste milieu, se sont des merveilleuses inventions, qui font disparaitre la distance, vous évite des déplacements et qui vous permet une connaissance sans limite 🙂
LikeLike
Merci à vous, Fanfanvaconsin, comme je suis quasiment toujours d’accord avec vos réponses, cela m’évite de le répéter 😀
LikeLike
🙂 Non pas de remerciement et de quoi grand dieu ? ! Je ne dépose ici que le fruit de ma pensée, d’ailleurs le web est partage aussi, n’est-ce-pas. Je reste persuadé qu’il faut vivre sa vie le plus simplement du monde sans pour autant chercher “la vérité”. Oui j’avais remarqué Elisabeth 🙂
Bon week-end Elisabeth !
LikeLike
Question de cycle aussi, comme une respiration. Parfois oui, parfois non!
LikeLike
C’est une mode, dans quelques années, ce sera autre chose, c’est une génération qui vit comme cela parce que les copains et les copines font de même alors il faut faire aussi pareil. Au restaurant, au lycée, dans les transports en commun, ils ne peuvent plus s’en passer.
On vit un peu comme cela, nous les adultes, mais seulement parce qu’on nous offre ces outils là. On est quand même moins accros, je pense. Bon week end.
LikeLike
puissiez-vous avoir raison…
j’avoue avoir de plus grandes craintes,
comme lorsqu’on voit deux amoureux sur un banc…
mais chacun perdu dans son portable!
LikeLike
De tout temps les aînés ont eu peur, des craintes pour les plus jeunes et pourtant la vie continue 😉
Faisons leur confiance à nos jeunes ! Il y a un temps pour tout, il faut que jeunesse se fasse !
De mon vécu, lorsqu’ils ont leur vie, leur intérieur, cela se passe 🙂
LikeLike
Je suis d’accord avec vous Jean Paul ! Hier c’était moi, lui donc Nous. Aujourd’hui, c’est lui et son portable, Moi et mon portable, un Nous menacé en quelque sorte par une déviance individualiste induite par le tout numérique …qui s’interpose insidieusement entre le moi et l’autre.
LikeLike
l’autre à distance?
LikeLike
Il mio tempo, ben dieci ore al giorno, è scandito dal cartellino da timbrare al lavoro, il bedg, e dalle ore di spostamento per andare e tornare. Il resto del tempo è pura SOTTRAZIONE. il Tempo è già tutto organizzato e non da me, io come detto SOTTRAGGO all’organizzazione della società, cerco di vivere negli spazi della trama di un tessuto sociale sempre più fitto e fittizio.
Glori
LikeLike
Pour résumer: Je surfe sur la toile, donc je suis?
LikeLike
Ou alors la toile est?
ou l’araignée
profite…
LikeLike
“La première forme d’exploitation vécue comme une libération”, voilà, tout est dit ! Et cela me laisse sans voix, sans autre commentaire qui serait à la hauteur de cette phrase, de ses tenants et de ses aboutissants, j’en suis navrée …
LikeLike
C’est trop gentil
merci
LikeLike
Merci infiniment!
je l’ajoute à mes pages de traduction,
si vous le voulez bien…
LikeLike
En tant qu’universitaire, vous savez mieux que quiconque combien la plupart de ces nouveaux outils vous permettent de gagner du temps en valeur relative (c’est-à-dire en comparaison avec la société qui en était dépourvue). Considérer la part toujours croissante des loisirs en Occident ainsi que l’augmentation d’un quart de siècle, en l’espace d’un demi-siècle, de l’espérance de vie moyenne devrait en outre inciter à la prudence quant aux paradoxes qui peuvent s’appliquer à l’utilisation de la notion de chronophagie, dont le travail de l’imagination est, à votre estime, le socle.
Ces outils peuvent être perçus comme des sources d’asservissement dès lors qu’ils sont utilisés par l’entreprise et / ou l’employeur comme des moyens d’empiéter allègrement sur le temps de l’employé qui ne relève pas des dispositions contractuelles auxquelles ce dernier a souscrit. Dans ce cas, leur caractère chronophage, s’il semble davantage établi, ne se considère pas moins sous un aspect négatif : le temps ne serait pas uniquement « mangé » ; il serait subtilisé contre leur gré non pas à un ou quelques-uns de leurs utilisateurs, mais à tous. Or, ceci n’est pas conforme à la réalité : la soumission volontaire (au sens où l’entendait La Boétie, mais « réformé ») est également à l’œuvre, agissant par l’entremise d’une auto-valorisation du moi social conférée par la possession et l’utilisation desdits outils.
Or, qui suis-je pour taxer d’abruti un aliéné au classique travail hiérarchique rémunéré, ou porter un jugement de valeur sur un choix individuel a priori respectable mais que je ne partage pas ? Assurément, quasiment de la même manière que tout portrait manichéen des psychotropes qui ne sont pas en vente libre relève de la propagande politicienne et de l’incantation schizophrénique, l’interrogation qui est ici la vôtre et qui s’illustre en carré blanc (les objets) sur fond blanc (la structure sociale), ne me semble pas suffisamment explicite, dissociative : dans les deux cas, c’est au mode d’utilisation individuel, dépendant ou non de la sphère professionnelle, qu’il incombe, me semble-t-il, de s’intéresser (lire le dossier central de La Recherche de septembre 2012). Ces modes sont-ils suffisamment convergents que pour s’inscrire dans une trame ? Dans l’affirmative, de quoi cette trame se compose-t-elle concrètement et quelles sont ses implications ?
Supra, un autre intervenant maugrée avec force points d’interrogation et d’exclamation mêlés contre ce qu’il croit avoir défini comme la cause première, toute désignée, du bouleversement techno-capitaliste dont Reagan a allumé la flamme, à savoir l’individualisme honni. A l’échelle (primaire) de la relation entre l’utilisateur et l’objet, on pourrait être tenté de déceler, en effet, des comportements individuels variables. Mais ces objets, ces outils, ont-ils été frappés d’un sortilège du Malin ? Non, bien sûr : ils ont leur place dans un cadre général, systémique, où ils se contentent de jouer le rôle que le système leur attribue. Or, indépendamment de la question de la consécration de l’individualisme par la DDH de la fin du XVIIIe et même – contradiction de taille – de l’impossibilité supposée pour des individualités de faire (efficacement) société, décantée du commentaire de l’intervenant mentionné plus haut, que serait un individualisme qui aurait à se déployer dans l’enceinte d’un cadre en réalité statique et incontestable dont seule la multiplication des hologrammes maintiendrait, par une sorte d’envoûtement en effet (vécu, mais visible simultanément par qui ?), l’illusion du changement fondamental (suprême hérésie pour les maîtres, en vérité), sinon frelaté ?
Dès lors, plusieurs questions me semblent se poser :
1/ La chronophagie de ces outils leur est-elle intrinsèque ou découle-t-elle du cadre systémique ? Partant, quelles sont les implications de la réponse sur les paramètres du travail de l’imagination et ses fruits ?
2/ L’utilisation de ces outils ne peut-elle se concevoir dans un environnement où le temps serait libéré du stress cardinal, c’est-à-dire réellement individualisé ?
3/ Plutôt que leur caractère prétendument uniformément chronophage, n’est-ce la mutation du contrôle social dont ils sont les vecteurs qui devrait être étudiée en priorité ?
Dans une réaction antérieure à un autre article, je vous renvoyais à plusieurs sites relatifs aux dernières applications ‘grand public’ de nouveaux objets ‘hi tech’ en cours de commercialisation (Google Glass, par exemple) ou en phase de recherche avancée (BCI, etc.). Dans le présent article, vous affirmez à votre tour que « le portable est le premier chronophage massivement accepté en tant que condition d’existence ». Je perçois dans cette dernière notion une touche d’ironie, et je ne m’y attarderai donc pas. En revanche, quant au présupposé dans sa globalité, il me semble faire très peu de cas de la télévision ! Or, entre les deux types de techniques, l’une supposant la passivité de masse, l’autre (ou les autres) l’interaction de l’observateur, quelle fondamentale mutation du contrôle social ne s’effectue-t-elle sous nos yeux…
Vous faites impasse sur la question (réservée à un article suivant, peut-être), comme vous semblez considérer que « la relation de communication chronophage est la première forme d’exploitation vécue comme une libération ». Mais que faites-vous alors du travail hiérarchique rémunéré, auquel j’aurais sans hésiter tendu la palme du genre ?
« Si on lie le salaire à l’emploi, on donne tout le pouvoir au propriétaire lucratif. […] C’est nous qui produisons la valeur, ce n’est [ni] Arnault, [ni] Mittal. [Ces gens-là] sont des parasites […]. A l’échelle du pays, nous produisons 2000 milliards d’€ par an : 700 [de ces milliards] vont à des propriétaires lucratifs, [soit] 35 %, qui n’en investissent que 400, [soit] 20 % [du PIB] seulement. […]Une des raisons de l’arrogance de cette classe, c’est que nous sommes obligés d’être demandeurs d’emploi si nous voulons travailler, parce que l’on a réussi à lier le salaire à l’emploi. […] », affirmait Bernard Friot à CSOJ, vendredi dernier, arborant une mine de dégoût prononcé. N’est-il pas là, le cadre ? Et ce qui suit n’est-il pas le plus sûr moyen de le faire voler en éclats, et toute chronophagie avec lui ?…
http://basicincome2013.eu/ubi/fr/
http://www.facebook.com/pages/Revenu-de-base-universel/448948405174469?ref=stream
LikeLike
Merci pour cette réponse, aussi fournie qu’argumentée.
Vous avez souvent raison.
Mais je viens d’achever un texte plus long sur la chronophagie.
Je vais y repenser, et vous répondrai plus au long
lorsque tout cela aura décanté.
De manière générale toutefois,
ce que vous dites sur les avantages des chronophages, si vrai soit-il,
n’exclue en rien qu’ils nous prennent notre temps (et aussi notre argent)
Ce mode de libération est donc en même temps un mode d’exploitation.
je crois que c’est ici la premier règle de la réflexion:
ne pas se laisser interdire par la contradiction…
LikeLike
L’intellectuel C. Licoppe parle de “présence connectée” : “la relation entre proches devient un tissu dense, sans couture, fait d’un entrelacement continu d’interaction en face à face et d’actes de communication médiatisés, et où la prolifération des contacts est garante du lien. Cette présence connectée brouilles les frontières entre présence et absence. Nous sommes toujours un peu présents à l’autre.”
Chronophagie ? Inexistence, dans l’attente d’une existence provenant de cette présence connectée (on tripote son smartphone mécaniquement et sans raison à une terrasse de café) ? Ce qui revient un peu au même, me direz-vous… Mais les conséquences (positives ou négatives) ne sont-elles pas dues, simplement, à l’usage qu’on fait de ces outils, de ces TIC (étrange ironie que cette abréviation pour caractériser ces technologies de l’information et de la communication qui développent en nous, il est vrai, de véritables tics chronophages). Le problème, c’est qu’il faudrait apprendre à s’en servir comme il se doit, à pointer les usages de ces outils et pour quelles causes. Nous naissons à présent devant ce fait accompli comme un fait naturel, avec une tablette comme une extension de nos membres supérieurs avant de savoir pourquoi, pour quoi et à cause/grâce à qui ?
« être connecté, c’est exister » vous dites, tout à fait. Et se déconnecter c’est quelque part résister, pour mieux “réexister”. Non ? Et pour moi la déconnexion est valable pour tout. Mais nous apprend-on à déconnecter ? Loin de là, ce serait plutôt l’inverse. Nous sommes sans cesse dans le trop-plein, le “trop connecté” qui n’amène que l’errance soit à travers sa consommation, soit à travers des tas de relations superficielles ou des tas de relations strictement utiles (le travail). Mais ayant conscience de tout ça, j’essaie de faire une utilisation de ces technologies raisonnée, non pas utile car je n’aime pas ce terme mais qui m’apporte plus qu’elle m’enferme. Une utilisation ordinaire qui suppose une continuité de l’existence.
Je suis d’accord avec vous tout en ne voulant ne pas être d’accord avec vous sur certains points (notamment sur l’aspect tarifaire de ces chronophages) ce qui fait qu’en un sens, je vous rejoins : Je me rends compte qu’en potassant mon travail de recherche qui porte justement sur la “communication électronique” et cette présence connectée qui fait naître de nouveaux usages linguistiques et sociaux, j’en ai totalement oublié de disposer à portée de main mon smartphone que j’ai d’ailleurs égaré, au même titre que mon envie de checker mes mails. Lorsque j’écris (je crée) idem, lorsque je lis, contemple ou médite c’est pareil, j’annule cette chronophagie [numérique] par la chronophilie en quelque sorte, par cet “art de l’oisiveté” qu’on abhorre soyons honnête.
Il s’avère qu’on m’a proposé récemment une offre d’emploi au sein du domaine universitaire et lorsque l’on m’a parlé de ma grande disponibilité par mail je n’ai pu m’empêcher de penser que je n’avais plus aucune raison de refuser de travailler non-stop puisque joignable non-stop. J’ai eu en effet, une sorte de frisson. Voilà ce qui s’imprègne dans les consciences collectives : la connexion incessante pour une sollicitation incessante. Et on l’accepte car comme le titre de votre ouvrage l’hypercapitalisme nous envoûte. Cette constante présence connectée nous rend constamment prêt et apte à répondre à toutes sortes de choses, de sollicitations dont l’appel au travail… Ce que les hippies nous vendait comme un véritable moyen de libération, de solidarité, d’égalité et de contre-pouvoir en cette toile d’araignée géante est également, comme vous le dites un moyen d’exploitation en effet.
Ce que Michel Serres nomme la troisième révolution de nos sociétés occidentales, il est essentiel de savoir pour quoi et par qui elle se fait et par qui est-elle subite ? Puisqu’il est dorénavant évident (cf affaire Edward Snowden) que le big bang Internet, à l’origine de cette troisième révolution politique et sociale, est au mains des puissants et les TIC à la merci des industries au profit de ce que vous nommez très bien “l’hypertravail” et l’hypercapitalisme on peut dégager facilement leurs ambitions à l’égard de nos usages technologiques. Et voilà qu’on nous somme de consommer les TIC avant même de prendre conscience de leur éthique, qu’on se doit de checker nos mails partout au cas où le pôle emploi aurait daigner nous contacter sinon bonjour la culpabilité. C’est ainsi que nous devenons à la merci des technologies, exploités par nos propres créations devenues chronophages puisque davantage créées par un système qui l’est tout autant, non dans un but social mais dans l’illusion du social (l’imaginaire ?), sous-couvert d’une logique indéniablement économique asservissante.
Pour conclure je partage l’opinion de Yannick Baele : “ces objets, ces outils, ont-ils été frappés d’un sortilège du Malin ? Non, bien sûr : ils ont leur place dans un cadre général, systémique, où ils se contentent de jouer le rôle que le système leur attribue”
Votre réflexion m’a fait réagir tout en me permettant de potasser mon propre travail, pour cela je vous dois un double merci ! Dans ma réaction, il est clair que je me parlais peut-être plus à moi-même, en espérant avoir tout de même réussi à être clair.
LikeLike
Grand merci à vous pour cette lecture
aussi précise qu’argumentée
Je suis heureux que nos hypothèses soient si proches
en particulier autour de la double nature:
exploitation et libération
de nos nouveaux liens, si prenants.
Au plaisir de vous lire.
J’ai bien peu de temps en ce moment,
mais si votre travail est en ligne,
j’en prendrais volontiers connaissance.
En tout cas, à bientôt j’espère
LikeLike
Salut, Clément !
Jean-Paul écrit à plusieurs reprises que tout et chacun doit se vendre. Mais se vendre n’est que le moyen d’arriver à la fin fixée par le programme socio-économique qui régit nos vies, lequel est simultanément pierre angulaire du projet, à savoir rapporter (à qui ?), qui s’assortit de la nécessité impérative de maintenir la plèbe sous contrôle, en priorité par la distraction de son attention, mais, si nécessaire, par la coercition.
Dans ces conditions, la rapidité frénétique qui agite nos sociétés en général autant qu’une très large part de leurs zombies-Prozac à titre particulier ne fait pas mystère. L’ensemble donne lieu à une espèce de pseudo-rationalité nue de premier degré, dans laquelle penser à autre chose qu’audit objectif écarte de la voie. Ceci permet d’expliquer en partie le déclin des lettres, du bel esprit – toutes choses qui ne rapportent pas –, l’extrême difficulté de prendre de la hauteur par rapport à l’aberration d’une objectivité asymbiotique détachée (comme sous cloche) qui nous est présentée par l’imposture d’un matraquage extérieur comme l’expression exclusive du réel.
Quant à se laisser divaguer, cela représente, plus encore qu’une attitude qui suscite l’aversion, la subversion caractérisée. Nos sociétés se calquent – tu me pardonneras l’ambiguïté de ce qui suit – sur le rythme des bourses. Qu’y a-t-il donc d’étonnant, dès lors, à la résurgence massive de comportements primitifs, voire bestiaux, au sein des premières, dans la mesure où l’anti-modèle imposé par les secondes a pour assise l’apologie de la pulsion irrationnelle (souvent cocaïnée), rémunérée comme nulle autre activité ?
La naturalité de la concurrence qui y règne sans partage a perverti le bien-fondé de la définition de soi comme individu. C’est pourquoi je m’inscris en faux par rapport à l’affirmation dénichée sur ton blog selon laquelle « la liberté [est poussée] à son paroxysme absurde ». Les agents destructeurs du ciment social que tu décris par ailleurs, à savoir « la méfiance permanente, la réfutation en première impression, la contradiction futile et [le discrédit] en contre-argument constant » participent du gigantesque effort de destruction du collectif (affaiblissement programmé de syndicats par ailleurs vétustes et peu préparés à pareille offensive concertée, tarissement ordonné des finances publiques, donc des ressources dont disposent les services homonymes, et privatisations à tout-va dans la foulée), car si l’union fait la force, n’est-ce pas en divisant que l’on règne mieux ? Par l’entremise d’une telle stratégie, l’économie financière se propose de résoudre la quadrature d’un certain cercle, affichant fièrement sa réussite : « not only can you fool some people sometimes, you can also fool all of them all the time. »
Passe encore que nous n’ayons a priori confiance en rien, comme tu lé déplores dans la suite de ton paragraphe : personnellement, je suis d’avis que l’attitude de doute méthodique est très saine, si tant est que la possibilité, à un moment ou un autre, de tisser des liens plus profonds, soit présente. Ce qui est à déplorer, c’est la réduction drastique, dans ce schéma, du champ des possibles, au nom de la liberté d’entreprendre, que tu formules comme suit dans ta très juste conclusion : « le commun ne brille plus, la subversion non plus, on se complaît dans la figure du troll qui nous pousse chaque jour un peu plus dans l’apathie et la paranoïa. »
Subsidiairement, tu évoques ici l’éthique des TIC. Mais le marché n’a pas d’éthique ; il n’a qu’un mode de fonctionnement limpide, dont toute interprétation, toute inflexion humaine (l’éthique étant le fruit d’un raisonnement individuel) est cruellement absente. Quant au « hippisme » que tu mentionnes, je ne parviens pas vraiment, sans plus d’indications, à définir la portée que tu lui accordes, ni la situation dans laquelle tu le contextualises : certes, l’ARPANET a vu le jour au milieu des années septante, mais ses concepteurs étaient loin d’imaginer ce qu’il deviendrait. A l’époque, l’idée d’interconnexion électronique globale était un non-sujet (public). Ces concepteurs, les considères-tu hippies parce qu’ils vivaient à une époque que l’inconscient et l’imaginaire collectifs contemporains associent à ce mouvement (qui fut en réalité très éphémère), ou fais-tu référence aux anciens hippies qui, opportunistes, se sont, lorsque les choses se sont gâtées, reconvertis en chercheurs d’or ?
Fait accompli ? Pourquoi ? Mouvement, expansion de l’humanité, ébauche de sa coordination… Il est plutôt heureux que des sauts techniques s’effectuent de génération en génération. Par qui ? Les noms ont-ils, à ce stade de l’observation, leur importance ? Prends Zuckerberg : tu ne penses tout de même pas que c’est pour son talent (a fortiori ses patentes) qu’il a été propulsé où il est ? Il était supposé rapporter, c’est tout. Et il présente l’avantage d’être (encore) extrêmement malléable. Les techniques dont question sont là et elles ne disparaîtront pas, c’est ce qui compte. A partir de ce constat, quelles seraient les questions pertinentes à se poser ? Selon moi,
1/ Quelle était leur architecture originelle, quelle est-elle actuellement et quelle pourrait-elle être dans le futur ? (cf. Assange)
2/ Quels progrès représentent-elles pour l’humanité, et quelles menaces (cf. SOPA / PIPA, ACTA, PRISM, BULL/ Amesys, etc.), principalement quant à nos libertés individuelles ? Quelles ripostes possibles à ces menaces ? Ces techniques façonnent-elles de manière privilégiée un type donné de société ?
3/ Quel(s) groupe(s) en bénéficient-ils le plus (au sommet de la pyramide) ?
4/ Puisqu’il est entendu que leur contrôle accru est en marche, des îlots y seront-ils encore concevables ? (cf. Assange et sa proposition de généralisation du cryptage)
Une avant-dernière question me taraude, sans rapport avec les précédentes… La finesse de ta langue, la puissance de suggestion de ta poésie sont des denrées rares… Pourquoi Twitter ?…
Et la dernière pour la route : comment articules-tu la « [célébration de] l’homme tel qu’il est [et celle de l’homme] tel qu’il pourrait être » ? Est-ce l’humain qu’il faut comprendre ici, ou l’individu ? Dans le premier cas, où situes-tu l’homme actuel sur l’échelle de l’évolution ? Dans le second cas, comment dépasser la contradiction fondamentale ?
Au plaisir de te lire…
LikeLike
Bonjour à toi Yannick
Je commençais à culpabiliser de ne pas répondre à ton commentaire qui, je pense, m’était directement adressé ? (je n’ai pas l’habitude que l’on m’appelle par mon prénom sur internet 🙂 voilà pourquoi je pose la question, mais il s’avère que c’est bel et bien mon prénom)
Je n’ai malheureusement guère de temps en ce moment mais je tenais à répondre tout de même au risque de te décevoir en ne répondant pas de manière très argumentée je m’en excuse.
Je ne peux être que d’accord avec deux prémisses que tu exposes et qui me semblent fondamentales :
“Dans ces conditions, la rapidité frénétique qui agite nos sociétés en général autant qu’une très large part de leurs zombies-Prozac à titre particulier ne fait pas mystère. L’ensemble donne lieu à une espèce de pseudo-rationalité nue de premier degré, dans laquelle penser à autre chose qu’audit objectif écarte de la voie. Ceci permet d’expliquer en partie le déclin des lettres, du bel esprit – toutes choses qui ne rapportent pas –, l’extrême difficulté de prendre de la hauteur par rapport à l’aberration d’une objectivité asymbiotique détachée”.
Au fond la déception va paraître d’autant plus grande que je n’ai strictement rien à ajouter derrière ça, je partage totalement ce constat.
Et, “La naturalité de la concurrence qui y règne sans partage a perverti le bien-fondé de la définition de soi comme individu.” C’est une phrase que je trouve magnifique et un fait que je pense indéniable.
Dans un mouvement incessant de va-et-vient, ces deux prémisses sont liées, se complètent pour nous ancrer, individus, dans ce système, où la subtilité machiavélique réside dans le fait que chaque élément et chaque problématique peuvent être pris, constatés, travaillés de manière isolée mais jamais résolus car étroitement liés et inter-dépendants à l’autre et à un tout. De là, l’échelle de l’individu paraît bien bancale et impuissante face à ce grand [Mani]tou[t], alors à quoi bon essayer de lutter, d’être soi; ce léviathan nous éduque au désespoir, à l’effacement de soi, de l’individualité (comme quoi pour moi, individualisme ne va pas de paire avec individualité au contraire, on aspire tous aux mêmes choses) et nous empêche d’avoir non seulement une vue d’ensemble et la vision de nous-mêmes en tant qu’individu (quelles sont mes forces, mes faiblesses, mes volontés, mes passions, mes luttes ?). L’impression que nous vivons alors sans consistance comme des spectres. Le pire c’est l’absurde qui jaillit de notre conscience à tous de cet état des lieux et de notre impuissance à lutter contre lui.
Là où justement Internet, et les TIC qui l’accompagnent, aurait pu se révéler être un vrai contre-pouvoir et un outil au service de la liberté et du savoir (ce qu’il est de manière inhérente, voilà pourquoi je parlais des hippies qui sont la source de la genèse d’internet, pour mieux comprendre, je conseille de visionner le documentaire “une contre-histoire d’Internet” par Julien Goetz et Jean-Marc Manach) il ne devient qu’un chronophage au service d’un système global, un chronophage régi par les règles et symptômes de ce système : rapidité, performance, productivité, absence de recul, individualisme, désinhibition, mise en scène de soi. Sauf que les TIC deviennent des accélérateurs vampiriques.
Mais pourquoi je parle d’éthique ? car rien n’est une fatalité et rien n’est absolu, l’individu persiste bel et bien, même malgré lui, et j’ai tendance à adopter un point de vue optimiste (d’ailleurs dans mes travaux de recherches certes ancrés en Sciences du langage, je traite de cette créativité [positive ?] du langage et du visuel, ce bricolage constant, la recherche de substituts au “réel” étant donné notre absence physique et que nous sommes dans une continuité réel-numérique; cf “présence connectée”). Et je persiste à croire que les TIC, même ancrées au sein de notre quotidien, devraient être sujet à pédagogie, non pas au moralisme mais à la pédagogie, l’apprentissage, et à la familiarisation avec la culture qu’elles imposent. Ensuite, l’éthique, étant le fruit d’un raisonnement individuel comme tu le dis très bien, dans ce contexte peut être favorisé. Ce ne sont que mes hypothèses évidemment.
Michel Serres, en abordant le sujet des TIC avec son regard extérieur de philosophe ose parler d’une troisième révolution de nos sociétés occidentales qui engendre des mutations politiques, économiques, sociales et surtout culturelles, c’est qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle variété de marteau amélioré, c’est un sujet plus important qu’il ne faut pas prendre à la légère sous prétexte que les TIC font partie intégrante de notre quotidien. Pour les parents d’aujourd’hui, est-il judicieux d’entreprendre les premiers contacts de leurs enfants avec la langue écrite, avec les mots via une tablette par exemple (l’écran ne favorisant pas tellement la concentration mais plutôt la fatigue…) ? Ou de foutre le bon vieux dico à la corbeille (la vraie) au profit d’un “tout-google” déifié ? Quelles conséquences ? On peut se poser ces questions.
Les TIC, sont une véritable culture qu’il faut acquérir, s’approprier, comprendre et faire évoluer, une culture dont il faut pouvoir également s’extirper, pour en faire un usage en toute liberté, en toute conscience. Le véritable chronophage, de là et d’après moi, n’est pas tant ces TIC, mais un système qui nous empêche d’avoir du temps (un véritable chronophage donc), ce temps salutaire, le temps d’apprendre, de comprendre, de prendre du recul, de réfléchir, de ne rien faire, de se chercher, de se déconnecter et d’utiliser de manière adéquate les TIC.
Ce contexte nous inciterait-il à voir dans l’usage des TIC une sorte d’échappatoire, à n’importe quel prix, un usage souvent maladroit et superficiel qui nous donne l’illusion peut-être d’un autre monde dans lequel on se met en scène, se désinhibe sous couvert de l’anonymat et du fait de notre absence physique, ce qui nous donne l’illusion d’un pouvoir, d’une importance (en offrant la possibilité à ses ami.e.s et contacts d’être joignable partout), d’une liberté, la liberté d’être soi (l’illusion du moins).
Et pour répondre à certains de mes propos avec lesquels tu n’es pas d’accord concernant “le paroxysme de la liberté”, dans mon article, je laisse planer un mystère par l’absence d’explicitations et l’aspect décontextualisé, mais il s’agit d’une expérience précise : la mienne. J’ai constaté que nous étions dans une constante joute d’opposant pour tout (nous l’avons vu dernièrement pour l’accès au mariage pour les couples homosexuels, en politique…) où règnent l’absence de discussion, de recul et l’absurde d’un paradoxe : la prise de conscience du monde dans lequel nous vivons mais la profonde inertie qui nous assène (où qu’on nous assène ?).
Alors nous n’avons plus confiance en rien : institutions, autorité, politique, culture, art, en nous-mêmes ? Nous voyons le mal partout d’où la paranoïa (légitime) qui en découle mais pour autant j’ai rencontré l’orgueil du préjugé, du raccourci intellectuel, l’orgueil de l’opinion car aujourd’hui nous avons tous un avis sur tout. Confiance en rien et perdu, mais orgueilleux en tout (une manière de contre-balancer justement ?). Le paroxysme de la liberté dans ce contexte et mon expérience (je ne généralise donc pas) c’est la constante contradiction, le fait de toujours contredire, non de douter des propos de notre interlocuteur justement mais de simplement contredire. Un phénomène légitimé par la liberté d’expression. Une contradiction que pourtant je promeus comme un art de vivre tenant sa source dans un “ni dieu, ni maître” mais pas sans modèle, mais qui engendre le sur-place si elle n’est pas constructive. L’époque devient alors une cacophonie aphone. Au lieu de construire on ne fait que détruire pour laisser en plan. C’est ce que j’appelle le paroxysme absurde de la liberté car il s’agit d’une liberté que de détruire sans reconstruire. Mais ce serait dresser un portrait bien noir en oubliant de parler de tous ces gens, comme nous quelques part et comme jean paul galibert, qui à leur échelle, construisent.
Et donc tu poses des questions pertinentes auxquelles je réfléchirais avec le temps, auxquelles nous (la société, les intellectuels, les chercheurs) nous réfléchirons avec le temps.
Et pour répondre à tes dernières questions : comment j’articule l’homme tel qu’il est avec l’homme tel qui pourrait être ? Là encore il s’agit d’un grand enthousiasme doublé d’un optimisme qui me permet de penser et sortir ce genre choses !
Je parle ici, comme tu l’as mentionné de la célébration de l’homme tel qu’il est mais dans tout ce qu’il a de positif et de créatif, de solaire. C’est contrer l’idée séculaire que nous ne voyons que ce qui ne va pas, la noirceur. Voilà comment, par la suite logique, nous pouvons célébrer l’homme tel qu’il pourrait être. En espérant ne pas être catalogué de “bien-pensant”, c’est une mode qui m’horripile, une mode qui prouve mon constat sur cette incessante joute d’opposants où tout devient suspect : tu prônes l’optimisme, t’es démago ou bien-pensant. Tu prônes la créativité et la culture t’es un bobo (on me l’a déjà sorti ça) etc…
L’espoir, l’optimisme, sont des aurores et également des horizons qui permettent de montrer les esquisses d’un homme nouveau, d’un homme qui se renouvèle sans cesse.
Et en effet, il s’agit en premier lieu de l’individu, cultivant ses individualités, qui pour être subversif ira vers le collectif. Ainsi redessiner l’humain. Évidemment je simplifie, mon commentaire est immense !
Enfin, pourquoi Twitter ? Au départ, il s’agissait d’être dans le “moove”. Je venais de créer mon blog et j’ai été poussé par un ami à m’inscrire sur ce réseau social.
Par la suite Twitter est devenu un véritable outil qui change ma vie. Selon l’usage que l’on fait Twitter peut se révéler être un outil fabuleux. Plus qu’une plate-forme où j’offre des choses, c’est plutôt d’elle que je reçois plus que moi je donne.
Je me tiens à l’affut de toute actualité “chaude”, des tendances sociales et culturelles mais également artistiques.
Et je te remercie infiniment pour ces compliments sur ma poésie et la finesse de ma langue, justement Twitter se révèle être, pour moi, un bel exercice de concision (un exercice que je ne maîtrise pas tellement, il faut juste regarder ce commentaire !). Puis il s’agit aussi d’un challenge, celui d’introduire de la poésie, et du mot d’esprit sur cette plate-forme qui ne s’y prête pas forcement, et il s’agit d’une manière d’arpenter les différents supports, des supports qui me passionnent, qu’ils soient papier ou numérique.
J’ai enfin répondu, je suis soulagé !
Très bel échange en tout cas.
PS à Jean Paul Galibert :
Je vous remercie pour cet intérêt que vous portez envers mon travail. Je vais essayer incessamment sous peu de le mettre en ligne, compte tenu du succès qu’il a rencontré, je n’ai plus cette appréhension de le faire découvrir. Je vous tiendrais informé.
À bientôt, de toute façon je vous lis très régulièrement.
LikeLike
Mon chronophage c’est la soif .
LikeLike
Comment cela?
LikeLike
soif de cliquer , soif de téléphoner , soif de regarder , soif de parler , soif de râler , soif d’engloutir … soif de à l’infini , la soif s’accommode de tout objet , objets qui au demeurant ne sont pas mariés avec elle , mais elle , la soif , s’infiltre comme un parfum , sur tout et tout le temps , un chronophage …enfin rares sont les temps qui n’ont pas été absorbés , mangés par elle
vous voyez ?
LikeLike
J’ai bien fait de demander…
LikeLike