Pour être heureux, soyons demeurés.

Il faut être demeuré. C’est tout un art, qui est le bonheur même. Demeurer c’est être sans histoire, comme le bonheur. Il n’y a point d’histoire en lui, car il est toujours avant le récit, ou après. Il n’y figure jamais, sinon comme une situation d’emblée perdue, des moments de suspension, autant de parenthèses au fond inénarrables, ou cette fin heureuse où le récit s’interrompt. Il n’est d’histoire que du malheur. En la demeure, il n’est point de péripétie.
Le bonheur est demeuré. Le bonheur fait sourire, bêtement. Celui qui est heureux, comme celui qui s’en moque, car on a toujours raison d’être tout bêtement heureux. Et rien n’y peut rien, pas plus l’intelligence si triste, sinistre, que la mort elle-même. Car qu’est-ce qui demeure après la mort ? seulement ce qui demeure déjà pendant la vie. Car la mort est un miroir : ce qui est après est avant. Je n’imagine jamais après elle que ce que j’aurais dû vivre avant elle. La mort n’est pas un futur : elle n’est que l’irréel du passé. La mort ne change rien au fait d’avoir vécu. En ce sens, seulement mais suffisant, la vie demeure après la mort. L’essentiel est donc de demeurer sa vie durant.

14 thoughts on “Pour être heureux, soyons demeurés.

  1. Pour cette quete du bonheur,je méditerais sur le titre de votre article:”pour etre heureux,soyons demeurés”.Une véritable philosophie de vie à appliquer à la lettre pour éviter d’etre malheureux pour le restant de ses jours sur la planète TERRE.RENDEZ-VOUS le 22 DECEMBRE 2012 pour un nouveau départ vers ce changement RADICAL en chacun de nous-memes.Un bonheur retrouvé…

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  2. Pas d’accord du tout avec cette analyse ou alors cela affirmerait que la connaissance intellectuelle ou spirituelle est l’antithèse du bonheur

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  3. Je ne suis pas très sûre de bien comprendre, car chez nous, un demeuré est quelqu’un à qui il manque des cases…et de sérieuses. Pas sûr que si on le met dans la vie courante, celui qui est demeuré soit un être heureux.
    Alexandre Jolien était considéré comme demeuré. Mais il n’y a pas philosophe aussi touchant!
    Dans l’autre sens, on peu se référer à Lao Tseu et son explication du Tao. Maîtriser le singe fou, c’est déjà une partie du bonheur…

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    1. Votre réaction me fait penser à ceci => “Heureux sont les simples d’esprit car le royaume des cieux leur appartient !’Être “simple d’esprit” … citation plus connue …
      Bon Weekend à tous(tes)))) 🙂

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      1. Sauf que cela signifie : ceux qui se sentent abandonnés de dieu dans leur condition. Il s’agissait d’une erreur de traduction en latin qui a perduré au fil des siècles.

        Pour rebondir sur l’état de celui qui doit demeurer au sens d’attendre : il y a toute une philosophie de l’attente, du moment laissé à soi, de cet instant de calme et de sérénité qu’il est important de s’offrir dans un monde qui ne pense qu’en terme de rentabilité.

        Quant à demeuré au sens de gentil benêt, on aurait envie de se référer à cette citation de Montaigne qui illustre assez bien la nécessité d’une absence d’intellection, de réflexion plus approfondie pour continuer d’avancer dans un monde qui ne nous ressemble pas : “le courage des pauvres, c’est de n’y penser point”.

        La tentation est grande de conclure que le bonheur ne saurait appartenir qu’à ceux qui ne réfléchissent point et avancent tels des automates animés par le besoin de survie, mais n’est-il pas bon de demeurer avec ce fol espoir que la connaissance nous manque pour apercevoir la grâce de notre monde ?

        Un petit billet au demeurant bien stimulant !

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  4. dingue de constater l’imperméabilité de certains à votre poésie politique, mister JCG. Vos deux derniers articles sont impressionnants (et j’y souscris) de subtilité quasi perverse. OU bien c’est moi. 🙂 bonne fêtes monsieur G. !

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