Philosophie: Le nombre des touts

En plus du réel et du possible, il convient sans doute d’admettre un bon nombre de touts. On pense à l’être, puisque tout est, en un sens (au sens très platonicien suivant lequel l’être comme devoir être permet de définir la nature de la chose dont on parle, comme l’Idée donne à la chose sa forme). Mais on cite de plus en plus souvent le langage, dont il faut bien reconnaître qu’il trace dans le réel les limites de chaque chose. En un sens, si l’on veut, tout est absurde, tout est monde, etc. Multiplions les touts sans crainte d’incohérence ou de morcellement, car d’un côté ils sont tous si bien fondus dans cet Un antédiscursif, où tout revient au même, que de l’autre ils peuvent proliférer sans le moindre risque d’éclatement, ou de contradiction : il y a autant de touts que de mots pour tout dire, même si tous, au fond, désignent la même chose.

4 thoughts on “Philosophie: Le nombre des touts

  1. On “admet un bon nombre de touts” : l’être et le langage étant des touts remarquables, et les autres pouvant être “multipliés”. Qu’est ce qui empêche de penser que tout soit systématiquement tout ?
    S’il y a un “Un antédiscursif” (l’est t-il ? Comment le prouver? ) où “tout revient au même”, comment différencier, à l’intérieur, ce qui est tout de ce qui ne l’est pas ?

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    1. Si tout est systématiquement tout, on est très proche, en un des sens, du “n’importe quoi est n’importe quoi”. J’ai envie de dire oui, en raison de la totalité des possibles, mais on est si loin de l’essence, de l’identité et de la permanence que j’hésite tout de même. J’ai toujours une réserve intérieure face à l’évidence logique, sutout lorsqu’elle est aussi paradoxale. J’ai l’impression désagréable d’être saisi, bloqué, entre deux fascinations adverses, l’une pour une logique usuelle plutôt fixiste, claire, vraisemblable et sans surprise, et l’autre pour une ludique, un raisonnement fascinant par ses paradoxes, aussi nécessaire en lui même que sans garantie extérieure. Je n’ai rien encore tranché pour mon propre compte.
      Quant à l’antédiscursif, il n’a pas besoin de preuve, puisqu’il est présupposé par toute défiance envers l’arraisonnement. En effet, si l’on insiste sur une sorte de droit entier du réel à ne pas être ce que l’on en dit, à la manière de kant, mais à propos du langage, on est bien obligé de supposer un antédiscusif. Le fait qu’il revient au même découle du fait que la distinction des choses par le langage ne s’est pas encore opérée, en sorte qu’il y a bien un réel, mais pas encore de monde, comme avant l’homme. Et de cela, du réel indépendamment de nous et de nos mots, nous ne savons rien, ou presque, faute d’en pouvoir parler, puisque toute parole le transformerait aussitôt en monde, ensemble de choses découpées dans le réel par le langage.

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    1. Ils seraient sans doute la même chose, si nous pouvions le savoir. Mais comment, sans le langage? A condition encore de s’entendre sur le sens à donner aux singuliers, (voire aux majuscules, peut-être inutiles): ‘le Un’, “le réel”. L’un est ici l’uni, une sorte d’indistinct qui n’entraine aucune homogéneité. En ce sens le vrac le plus vrac est encore un. Enfin, ces touts qui sont un ne sauraient être des “choses”, à moins de trouver un sens réel à une expression (surprise à la lettre) comme “une seule et même chose”…

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